Sort des femmes dans les théocraties : « Il est crucial que la République française ne fléchisse pas »

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Tribune. Cette tribune, signée notamment par Karim Bouamrane, Laurence Rossignol, ou Carole Delga exhorte les forces de gauche à dénoncer plus clairement le sort des femmes en Afghanistan, en Iran ou au Kenya.

Le Parlement européen remet mardi le prix Sakharov à titre posthume à Mahsa Amini ainsi qu'au mouvement iranien "Femme Vie Liberté"
Le Parlement européen remet mardi le prix Sakharov à titre posthume à Mahsa Amini ainsi qu’au mouvement iranien « Femme Vie Liberté »afp.com/JACK GUEZ

Alors que les Jeux Olympiques et Paralympiques viennent de s’achever, faisant vibrer de joie chaque Français au gré des valeurs de fraternité, de courage, d’inclusion et d’égalité entre tous, nous ne pouvons que nous émouvoir du sort de ces athlètes femmes qui nous rappelle le combat sans relâche que nous devons mener contre les violences et l’oppression faites aux femmes.

Elle s’appelle Rebecca Cheptegei, marathonienne ougandaise de Paris 2024, tuée par son compagnon la semaine dernière au Kenya, pays où en 2022, au moins 34 % des femmes ont déclaré avoir subi des violences physiques.

Elle s’appelle Marzieh Hamidi, athlète réfugiée afghane, qui continue de vivre à Paris sous la menace. Exilée pour fuir les talibans, elle reste une cible soulignant que l’oppression ne s’arrête pas aux frontières.

Elle s’appelle Jina Mahsa Amini, Kurde iranienne de 22 ans, arrêtée par la police à Téhéran le 13 septembre 2022 pour avoir prétendument ignoré les strictes lois iraniennes sur le port du voile. Elle est décédée à l’hôpital trois jours plus tard à la suite de violences physiques subies pendant sa garde à vue.

La mobilisation contre les théocraties qui bafouent les droits des femmes est une exigence morale et politique incontournable dans un monde qui se veut attaché aux valeurs universelles des droits humains. Ces régimes, souvent ancrés dans des interprétations rigides et régressives de la religion, imposent un système d’oppression systématique qui marginalise, violente, réduit au silence des millions de femmes en niant leur liberté, leur autonomie et leur humanité. L’Afghanistan sous les talibans en est un exemple flagrant. Les femmes y sont réduites à l’état d’ombres invisibles, sans droit à l’éducation, au travail, ni même à la simple expression de leur voix en public. L’interdiction pour les Afghanes de chanter ou de parler dans la rue incarne une répression absolue, un apartheid de genre institutionnalisé.

La France se doit de protéger ces femmes

Il est impératif de rappeler que la cause des femmes sous les régimes théocratiques est une cause universelle. En France, pays des droits de l’Homme, il est crucial que la République ne fléchisse pas. Elle se doit de protéger ces femmes, de leur offrir un espace où elles peuvent vivre librement. La France doit avoir pour mission, sur son territoire comme sur la scène internationale, de défendre les libertés fondamentales contre toute forme d’obscurantisme. Cela inclut le soutien aux femmes persécutées, mais également une vigilance face aux dérives intégristes qui pourraient s’infiltrer sur le territoire français.

En effet, il est tout aussi essentiel de dénoncer et de combattre les organisations, médias et personnalités qui relaient, jusqu’en France, les idéologies de ces dictatures théocratiques. En diffusant leur propagande, en modulant leurs critiques, en hiérarchisant les atteintes aux droits humains, ces acteurs participent à la justification des violences exercées contre les femmes.

Historiquement attachées à la défense des droits et à l’émancipation des opprimés, les associations et les forces de gauche laïques et républicaines doivent prendre une position claire et forte contre ces régimes théocratiques. Cela implique non seulement de soutenir les femmes afghanes et iraniennes, plus globalement toutes celles qui luttent contre ces régimes oppressifs, mais aussi de promouvoir une diplomatie plus ferme, des sanctions internationales ciblées, et un accueil inconditionnel des réfugiées persécutées.

La République doit être un rempart ferme et déterminé

Pourquoi le Corps des gardiens de la révolution n’est-il pas encore classé comme une organisation terroriste par le Conseil de l’Europe, au même titre que le Hamas ? Des semaines, des mois que nous crions FEMME, VIE, LIBERTÉ sans que nos gouvernements ne prennent la mesure de l’humanité qui se joue derrière. Comment s’expliquer que le Canada l’ait inscrit, le 19 juin 2024, sur sa liste des organisations considérées comme terroristes et pas nos démocraties européennes ?

La lutte contre l’apartheid de genre est une question de cohérence avec nos principes républicains de liberté, d’égalité et de laïcité. Le temps de sa reconnaissance par les instances internationales, comme le réclame de nombreuses ONG, est venu. Dans l’attente, la République doit être un rempart ferme et déterminé contre toutes les formes d’oppression et d’injustice, en particulier celles qui se nourrissent du patriarcat et de l’obscurantisme religieux.

* Cécile Fadat est éducatrice spécialisée et adjointe à la mairie de Condat (Haute-Vienne) ; Cécile Soubelet est directrice conseil et secrétaire de section de section PS Issy-les-Moulineaux ; Camille Vizioz-Brami est attachée de Presse et conseillère du 9e arrondissement de Paris

Premiers signataires :

Nadège Azzaz, maire de Châtillon

Karim Bouamrane, maire de Saint-Ouen

Geneviève Couraud, militante, secrétaire générale de NEGAR-Soutien aux femmes d’Afghanistan.

Michael Delafosse, maire de Montpellier

Carole Delga, présidente de la région Occitanie

Ayda Hadizadeh, députée du Val-d’Oise

Nicolas Mayer Rossignol, maire de Rouen

Laurence Rossignol, sénatrice du Val-de-Marne

Ariel Weil, maire de Paris Centre

Gulsen Yildirim, vice-présidente du Conseil départemental de la Haute-Vienne