MARSEILLE, SAMEDI 25 FÉVRIER 2023

SAMEDI 25 FÉVRIER 2023 DE 15:00 À 19:00
 

« On ne peut pas abandonner un pays dans la barbarie »

 

 

ENTRETIEN

La Marseillaise, 25 février 2023

Shoukria Haidar, présidente de l’association Negar – soutien aux femmes d’Afghanistan, participe samedi à une table ronde organisée par Femmes solidaires 13 dans le cadre de la journée du 8 mars.

La Marseillaise : Votre association vient en aide à la population afghane. Quelle est la situation sur place?

Shoukria Haidar : Voilà 18 mois que l’Afghanistan a été livré aux talibans par la communauté internationale, États-Unis en tête. On leur a donné des milliards de dollars d’armes. La totalité de la population à l’intérieur de l’Afghanistan et la diaspora sont contre ce régime. Les talibans sont un groupe terroriste sanglant et sans pitié. Ce n’est pas un groupe politique, mais une force d’attaque, de mépris et d’écrasement. Son objectif est de semer la terreur. Notre association lutte contre les talibans qui ont le même objectif depuis 25 ans : tout ce qui aspire à la liberté, au droit… doit être éliminé par la maladie, la tuerie ou contraint à l’exil et réduit en esclave.

 

Depuis qu’ils ont repris le pouvoir, les talibans multiplient la répression envers les femmes…

S.H. : Les femmes sont particulièrement visées. Pourtant, durant les 44 années de guerre que l’Afghanistan a subies, le pays tournait avec les mains des femmes. Interdire aux femmes de travailler, c’est les exclure de l’espace public. Elles n’ont plus le droit d’étudier et d’exercer les professions les plus simples comme boulangère ou couturière, par exemple. Elles n’ont même plus le droit de toucher des livres ! Notre travail est de sensibiliser et de mobiliser le monde sur notre cause, pour la non-reconnaissance des talibans, le rétablissement des droits des femmes et faire gagner le pays.

 

Vous craignez que ce régime soit reconnu?

S.H. : Si ce régime est reconnu, les pays s’engagent, acceptent et cautionnent le mal. Je peux vous raconter les histoires de personnes auxquelles on a tranché la tête, divisé la colonne vertébrale en deux, enlevé toutes les entrailles, sectionné les jambes au niveau des articulations, comme on découpe le poulet ou l’agneau, coupé les pieds et les hanches… C’est d’un sadisme pas possible. On ne peut pas laisser ces gens être reconnus pour diriger l’Afghanistan.

 

Pensez-vous que la communauté internationale en fasse assez?

S.H. : Quand les États-Unis ont passé leur accord avec les talibans, c’était sans les Afghans et le gouvernement d’Afghanistan. Donald Trump l’a conclu et il a été mis en place par Joe Biden. L’Afghanistan a été offerte sur un plateau d’argent et, avec, toutes les armes données par les pays du monde entier : la France, la Chine, le Japon… Dans cet affrontement mondial, chaque pays chouchoute les talibans pour avoir accès aux ressources souterraines du pays, que ce soit l’or, l’uranium, le lithium, le charbon, le fer… Mais ce groupe terroriste ne représente pas la société. Les Afghans subissent le malheur, le froid, la pauvreté et les maladies. Si on cède et que l’Afghanistan devient le QG mondial des terroristes, le monde ne sera pas en paix. La situation est catastrophique, mais nous irons jusqu’au bout.

 

Samedi, vous participez à une table ronde avec des femmes venues d’Iran et d’Égypte. Vos combats se rejoignent-ils?

S.H. : Pourquoi on s’attaque aux droits et au corps des femmes ? La femme est un élément central dans la société. Au sein de la famille, si elle est en bonne santé, éduquée et intelligente, la société le sera aussi. Si elle est perturbée, malade et sans ses droits, elle ne pourra pas bien élever ses enfants et cela se répercutera aussi sur l’homme. Nos problématiques se rejoignent, parce que nous avons toutes les mêmes problèmes. Notre combat c’est exactement le même, que ce soit en Afghanistan, en Syrie ou ici, en France. La démocratie est universelle et la charte des droits de l’Homme aussi. Les cultures et les religions doivent être respectées, mais nous ne pouvons pas abandonner un pays à la barbarie. Le monde entier doit travailler pour faire triompher le droit tout en respectant les subtilités et la beauté de chacun.

Entretien réalisé par Laureen Piddiu


Geneviève Couraud
de NEGAR, soutien aux femmes d’Afghanistan , Merci, Annick Karsenty , Martine Ragon et à toutes les Femmes Solidaires Marseille pour votre invitation et votre accueil. Merci aux amies présentes, Camille Thuet,@Renée Clergue, de la Marche Mondiale des Femmes-13-Paca, Daniela Levy et OLF 13 – Osez le Féminisme 13 . A bientôt pour d’autres actions collectives.

 

 

Soutien aux femmes d’ Iran, d’Afghanistan et d’Égypte